Page:Flaubert - Notes de voyages, I.djvu/344

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tomber jusqu’au jarret, c’était un vrai caparaçon de cheval, le tout terminé par des glands très lourds, toujours noir.

Toute la vie de Damas est concentrée dans les bazars, ils sont aussi animés et grouillant de monde que les rues sont désertes et silencieuses ; les robes des hommes, roses, vertes ou bleues, et la quantité de soieries, le tout éclairé par le jour doux d’en haut, fait de l’ensemble une grande couleur bigarrée d’un charme singulier. — Chaque marchand, assis sur le devant de sa boutique, fume le galaoum et reçoit ses visiteurs et ses acheteurs.

Les boutiques se ferment ; au milieu du paysage circulent le marchand de cherbet à la neige, le marchand de glaces et le loueur de galaoum, avec son réchaud de charbon pour allumer les pipes ; très peu de chibouks. Çà et là, au milieu des bazars, un bain ; le fellah passe tout nu, n’ayant qu’une serviette autour du corps, il va acheter du sucre chez l’épicier pour quelque cawadja qui se trouve au bain. À une place, le tombeau d’un santon : par la grille on peut voir des bâtons, des béquilles, des chapeaux, des bonnets, des loques et des guenilles de toutes sortes, appendus aux murs. Un santon se promène tout nu, espèce d’idiot qui fait des grimaces et crie ; les femmes stériles viennent lui baiser le membre ; il y a quelque temps il y en avait un qui les saillissait en plein bazar, les Turcs dévots entouraient aussitôt le groupe et, avec leurs robes, le cachaient aux yeux du public qui passait. La boutique de notre ami sheik Bandar-Abdul-Kader était au bout du bazar des tailleurs, à gauche.

Jeune homme à barbe jaune, coquet de ma-