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VOYAGE EN FAMILLE.

Descendus par le raidillon, les pins deviennent plus fréquents, la neige ne se voit plus qu’au haut des monts ; par place la terre est couverte de rochers ou d’écorces de sapins. Ça m’a rappelé certaines pentes de forêts de la Corse (après Bocognano pour aller a Ghisoni). Comme hier de Domo à Simplon, il me semblait me retrouver il y a cinq ans dans les Pyrénées, quand je fus de Laruns aux Eaux-Bonnes.

Brigues. — Encore les petits chapeaux des femmes. — Une belle, noire, souriante à sa fenêtre. — Ramée pour la fête-Dieu tout le long des rues, guirlandes vertes aux fenêtres des maisons. — Politesse un peu germanique et bête, quoique bonne des habitants. Type blond, doux ; pas d’élégance dans la taille des femmes, quoique leur figure soit agréable ; pas de sévérité ni de feu dans le regard. — Propriété du bourgeois ayant un établissement à Turin et regrettant l’Empereur. — Église au bout de la promenade, à un quart de lieue, affreuse par ses sculptures en bois. — Adieu à l’Italie ! — À gauche en sortant, grande montagne, prairies au bas, puis au milieu neiges et rochers, nue au sommet. C’est un spécimen de l’art du grand artiste. Comme tous les tons sont fondus et comme toutes les transitions sont ménagées, rien de disparate quoique rien de pareil.

Écrit à Brigues — 22 mai — 10 h. du soir.

De Brigues à Martigny. — Montagnes à gauche, couvertes de neiges, vallées vertes, beau pays, de Sion à Martigny surtout. C’est la vraie Suisse verte, neigeuse au sommet, plantureuse dans sa vallée. — Déjeuner à Sierre, chez le beau-