Page:Flaubert - Notes de voyages, II.djvu/13

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

charbonnier, affreuse canaille. Notre hôte me fait l’effet d’en être une autre, il nous débite d’affreuses blagues. — Son portrait par lui-même ! Celui de la reine de Grèce lithographié, signé Salmont au crayon.

Samedi 19. — Le docteur nous accompagne jusqu’au pied de la montagne. Toute la journée s’est passée à monter, puis à descendre la montagne qui sépare la vallée de Milassa de celle où nous sommes maintenant. Près du sommet de la montagne, colonnes disposées en rond (restes d’un temple de Vesta ?). Près de là, un grand morceau de mur en pierres ajustées les unes sur les autres, ouvrage romain. — Déjeuner près d’un ruisseau à eau jaunâtre, stationnant dans les creux de rochers. — Au haut de la montagne, à un tournant de la route, vue magnifique : toute la vallée, les montagnes boisées à droite et à gauche, se succédant en forme d’accents circonflexes élargis les uns derrière les autres et passant par tous les tons du bleu ; le plus foncé est au fond, tandis que les premiers plans sont verts.

Nous descendons pendant près de cinq heures, par des chemins fantastiquement mauvais, Stéphany déclare qu’il n’en a jamais vu de pareils ; cependant il n’y a ni précipice ni ravin. De temps à autre une fontaine couverte en pierres sèches, un tronc d’arbre creusé et plein d’eau. Moins d’arbres brûlés que sur l’autre versant de la montagne. Dans la montagne, couverte de sapins partout, nous rencontrons une jument et son poulain paissant tout seuls. Avant d’arriver à Karpouzelou, petit cimetière à droite, avec des chiffons suspendus sur les tombes.