désert écoutaient immobiles, tout encapuchonnés dans leurs vêtements de laine grise ; d’autres arrivaient par derrière ; les gardes, que la cohue poussait, chancelaient sur leurs chevaux, les Nègres tenaient au bout de leurs bras des branches de sapin enflammées ; et le gros Carthaginois continuait sa harangue, monté sur un tertre de gazon.
Cependant les Barbares s’impatientaient, des murmures s’élevèrent, chacun l’apostropha. Hannon gesticulait avec sa spatule ; ceux qui voulaient faire taire les autres, criant plus fort, ajoutaient au tapage.
Tout à coup, un homme d’apparence chétive bondit aux pieds d’Hannon, arracha la trompette d’un héraut, souffla dedans, et Spendius (car c’était lui) annonça qu’il allait dire quelque chose d’important. À cette déclaration, rapidement débitée en cinq langues diverses, grec, latin, gaulois, libyque et baléare, les capitaines, moitié riant, moitié surpris, répondirent :
— Parle ! parle !
Spendius hésita ; il tremblait ; enfin s’adressant aux Libyens, qui étaient les plus nombreux, il leur dit :
— Vous avez tous entendu les horribles menaces de cet homme !
Hannon ne se récria pas, donc il ne comprenait point le libyque ; et, pour continuer l’expérience, Spendius répéta la même phrase dans les autres idiomes des Barbares.
Ils se regardèrent étonnés ; puis tous, comme d’un accord tacite, croyant peut-être avoir compris, baissèrent la tête en signe d’assentiment.