Page:Fleischmann - Le Roi de Rome et les femmes, 1910.djvu/379

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physiques répond à une souffrance analogue de ma nature morale.|90}}
L’inutilité de mon traitement me décourage ; je sens que la vie m’échappe, je souhaite même d’abréger les tourments de l’épreuve ; et l’instant d’après je lutte avec une sorte de désespoir contre l’idée de la destruction ; je voudrais concentrer toutes les puissances de mon être matériel dans la plénitude d’un sentiment vif. Il me semble que l’agonie du fils de l’Empereur doit se terminer par un cri et non par un soupir.
Mais à qui pourrais-je communiquer ces derniers rêves d’un mourant ? Je retrouve jusque dans la sollicitude dont je suis l’objet, la mesure d’un dévouement vulgaire. J’ai été tyrannisé toute ma vie ; aujourd’hui les docteurs de la Faculté ont remplacé Metternich.
Ils savent bien qu’ils me tourmentent en pure perte, et, au lieu de laisser la nature achever son œuvre, ils gâtent par leurs prescriptions, les moments de répit qu’elle me laisserait. Mais ils ne connaissent pas toutes les ruses d’un mourant : quand je veux leur échapper, je leur laisse croire que je repose, et je profite de la solitude pour réfléchir sur le double mystère de la vie et de la mort dont je vais trouver le secret dans le sein de Dieu ; mais plus souvent, je l’avoue, j’aime à me replier sur moi-même et à faire le compte de mes courtes joies dans la vie de contrainte qui m’a été faite. C’est vous dire qu’après avoir été mon guide et ma force quand je sentais bouillonner dans mon sein la sève de ma jeunesse, vous êtes encore ma consolation, à présent, qu’à défaut d’espérances, je n’ai plus qu’à me réfugier dans mes souvenirs.


Ainsi, comment la France ne pleurerait-elle point le Jeune Homme animé de si nobles sentiments ?