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MONOGRAPHIE DE L’ANARCHISTE

mette chez toi… C’est seulement pour l’expliquer.

D… crut avoir trouvé un moyen de prononcer la clôture sur ce débat nocturne : il souffla la bougie. Gardrat, à tâtons, chercha des allumettes. Il allait d’une pièce à l’autre, dans le noir, renversant les meubles, les cristaux, les bibelots des étagères. Enfin il mit la main sur une boite de suédoises, revint vers son sauveur après avoir bousculé dans la salle à manger un dressoir chargé de vaisselle ; il ralluma tranquillement la bougie en disant :

— Je vois bien que tu ne m’as pas encore compris… Je te disais donc…

Et D… fut obligé de l’écouter jusqu’à quatre heures du matin. À ce moment, tombant de sommeil, il s’avoua convaincu, pour en finir. La grâce l’avait touché. Là ! Gardrat s’adressa des félicitations.

— Je pensais bien !… Un garçon intelligent comme toi !…

Et il lui pardonna.

Le lendemain, l’anarchiste gagnait la Belgique en s’applaudissant d’avoir recruté un néophyte.

Mais le plus formel exemple connu de monomanie de la propagande a été donné par Ravachol.

Une heure et demie à peu près après l’explosion de la rue de Clichy — où il avait failli périr par unité de circonstances que nous raconterons plus loin — Ravachol échoue au boulevard Magenta, dans le restaurant de Véry. Il s’était levé vers cinq heures, était venu de Saint-Mandé à Paris avec une valise