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ques heures et multipliez par 4,000, — ces lecteurs entraient, eux, dans les régiments et ils racontaient l’affiche aux camarades. D’autre part l’autorité militaire pouvait bien interdire l’entrée des publications anarchistes dans les régiments, consigner la propagande aux portes des casernes, mais elle ne pouvait empêcher qu’un soldat eût lu la feuille anarchiste dans un cabaret de banlieue ou qu’il l’eût achetée dans un kiosque. Le militaire rentrait à la chambrée et racontait à ses camarades comment on « engueulait » le colonel dans le journal.

Il faudrait ignorer absolument les rancunes sourdes de l’inférieur pour s’étonner qu’un levain de révolte ait pu pénétrer dans les casernes. Le soldat n’est pas toujours un héros ; il n’est même un héros que par exception. Il reste l’homme simple, campagnard, ouvrier qu’a raconté Edmundo de Amicis dans ses Scènes de la vie militaire. Étendez à toutes les armées les récits du lettré italien en souvenir de son passage à travers l’armée italienne, et vous aurez le troupier de tous les pays, le pauvre diable, le brave garçon recruté, qui va à la caserne et à la corvée comme il ira au feu, mais sans trop comprendre, par routine d’atavisme, parce qu’il a dans le sang l’acceptation de l’impôt du sang, mais sans vocation militaire, avec une docilité touchante. Insufflez l’esprit de révolte à celui-là. Peut être bien il est mûr.

Vers la fin de l’Empire un procès politique se jugeait à Blois, devant la Haute Cour de Justice, et