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de l’En-Dehors et du Falot Cherbourgeois, du Libertaire et de l’Attaque, lui a démontré qu’il fallait lâcher le « bagne militaire ». Le soldat a consenti, s’exposant du coup à cinq ans de travaux publics, sans compter un supplément d’expiation aux compagnies de discipline d’Afrique. Comme le pauvre diable ira jusqu’à Paris en tenue, son cas se complique : s’il a emporté ses armes, ses vêtements, les quelques munitions de sa cartouchière ou de ses fontes, il s’expose à une peine de cinq à vingt ans de travaux forcés. C’est le tarif. À ce compte, aucun ne se souciera de s’y exposer.

On en compte cependant au moins un par jour.

Le déserteur arrive à Paris, est reçu par l’anarchiste qui le déshabille et se charge d’expédier au corps son uniforme et surtout son équipement. Puis on lui rend une blouse semblable à celle qu’il portait autrefois et on l’expédie à l’étranger, dans les groupes de Londres et de Bruxelles où son initiation s’achève. Le » pousse-caillou » est devenu un « trimardeur ». C’est toujours la grand’route ; mais hors la loi. La liberté désormais, sans la patrie.

Nous en avons rencontré en Belgique, en Italie, en Angleterre, en Suisse, qui regrettaient le drapeau tricolore et baissaient le nez en passant sous le pavillon battant du consulat. J’en sais qui traînent à Londres une misère sordide, sans dignité, en racontant des histoires absurdes sur la vie militaire. L’un, un sous-officiers de chasseurs à pied, vint me visiter deux fois dans mon petit logis d’Alfred-Place,