Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/319

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M. Durand, se tenait auprès de moi ; et, soit dans l’intention de me flatter ou plutôt de faire parler mes regrets en les excitant, il ne cessait de me répéter, tout le long de la route, comme l’intendant du marquis de Carabas : — cette ferme est à votre oncle le señor don Pio de Tristan ; celle-ci à vos illustres cousins MM.de Goyenèche ; cette terre appartient encore à votre oncle ; cette autre aussi et toujours de même jusqu’à Aréquipa, sans que l’officieux M. Durand se lassât de me désigner les nombreuses propriétés de ma famille. Quand le bon Emmanuel s’approchait de moi, il me disait avec tristesse : — Chère cousine, nos parents sont les rois du pays ; aucune famille en France, pas même celle des Rohan et des Montmorency, n’a, par son nom ou sa fortune, autant d’influence, et pourtant nous sommes en république ! Ah ! leurs titres et leurs immenses richesses peuvent bien leur faire acquérir le pouvoir, mais non l’affection. Durs et petits comme des banquiers, ils sont incapables de faire une action qui réponde au nom qu’ils portent.

— Pauvre enfant ! Quels sentiments généreux ! À la noblesse de son ame mon cœur avouait bien celui-là pour mon parent.