Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/345

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faiblesse physique qui vous rend incapable de lutter contre le moindre obstacle, c’est vous qui osez avancer un semblable paradoxe ! Ah ! Fiorita ! on voit bien que vous n’avez pas été soumise au joug humiliant d’un mari dur, tyrannique, obligée de fléchir devant ses capricieuses volontés, de supporter ses injustices, ses dédains, ses outrages ; que vous n’avez pas non plus été dominée par une famille hautaine, puissante, ni exposée à la noire méchanceté des hommes. Demoiselle, sans famille, vous avez été libre dans toutes vos actions, maîtresse absolue de vous-même, n’étant tenue à aucun devoir, vous étiez sans obligation envers le monde, et sa calomnie ne pouvait vous atteindre. Florita, il y a bien peu de femmes dans votre heureuse position : presque toutes, mariées très jeunes, ony eu leurs facultés flétries, altérées par l’oppression plus ou moins forte que leurs maîtres ont fait peser sur elles. Vous ne savez pas combien ces longues souffrances qu’on est obligé de cacher aux yeux du monde, de dissimuler même jusque dans son intérieur, affaiblissent et paralysent le moral de l’être le plus heureusement doué ; du moins, tels sont les effets que ces souffrances produisent sur nous,