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Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/41

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partie de l’affection qu’il avait eue pour son cousin, et ce vieillard, dont les manières sont nobles, me reçut avec des égards qui montraient combien il me distinguait ; il me présenta à toute sa société comme sa nièce, et me combla de témoignages de bienveillance. Je reçus de même un très bon accueil de M. Bertera (Philippe), jeune Espagnol qui vit chez M. de Goyenèche et fait les affaires de mon oncle Pio de Tristan. J’annonçai à ces messieurs la détermination que j’avais prise de partir pour le Pérou. Je restai deux mois et demi à Bordeaux, prenant mes repas chez mon parent, et logeant à côté chez une dame qui me louait un appartement garni. J’éprouvai des lenteurs avant de pouvoir partir, et un concours de circonstances fortuites vint encore compliquer ma position. En 1829 j’avais rencontré à Paris, dans un hôtel garni où j’étais descendue en arrivant de voyage, un capitaine de navire qui venait de Lima. Surpris de la similitude de mon nom avec celui de la famille Tristan, qu’il avait connue au Pérou, ce capitaine me demanda si j’en étais parente : je répondis que non, comme j’avais l’habitude de le faire. J’avais depuis dix ans renié cette famille par des causes que, plus tard, je ferai connaître, et ce fut au hasard de cette rencontre que je dus d’entrer en correspondance avec mes parents du Pérou, de faire mon voyage et tout ce qui s’ensuivit. Après une longue conversation avec M. Chabrié (c’était le nom de ce capitaine), j’écrivis à mon oncle Pio une lettre qui est là pour attester de la noblesse de mes sentiments et de la loyauté de mon caractère, mais qui me perdit en lui révélant l’irrégularité du mariage de mon père. Je passais pour veuve dans l’hôtel et j’avais ma fille avec moi ; ce fut dans cette position que le capitaine Chabrié m’avait con-