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Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, I.djvu/67

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plains bien ; car, moi aussi, autrefois j’ai beaucoup souffert du mal de mer ; mais, tranquillisez-vous, nous voilà enfin sortis de la gueule du gouffre, nous venons d’entrer en pleine mer ; ne le sentez-vous pas aux doux balancements qui succèdent aux horribles convulsions que nous éprouvions tout à l’heure ? Le temps est magnifique ; si vous aviez la force de vous lever et de monter sur le pont, cela vous ranimerait ; il règne là haut un petit air pur et frais qui fait plaisir.

Je le remerciai du regard, étant trop affaiblie pour pouvoir seulement essayer de parler.

— Pauvre demoiselle ! reprit-il avec l’expression d’une bonté compatissante, ce temps va vous permettre de dormir. Et moi aussi, je vais dormir, j’en ai bien besoin.

En effet, nous dormîmes tous vingt-quatre heures de suite. Je fus réveillée par M. David, qui ouvrait toutes les cabanes avec grand bruit, parce qu’il voulait savoir, disait-il, si tous les passagers étaient décidément morts. Nous n’étions pas morts ; mais, grand Dieu ! en quel état étions-nous ! M. Chabrié, trop supérieur, comme homme, pour chercher à se faire un titre du commandement du navire confié à ses soins,