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douce rêverie, causant avec Carmen, tandis que celle-ci fumait son cigare.

— Dites-moi, chère Florita, dans votre belle France avez-vous un vallon qui vaille celui-ci ?

— Non, cousine, je ne crois pas qu’il existe, dans aucun autre pays, une vallée plus pittoresque, une ville plus bizarrement placée, des volcans à la teinte plus mélancolique, aux proportions plus gigantesques, à l’aspect plus poétique.

— Et tout cela, Florita, laisse l’ame des Aréquipéniens froide, stérile ; jamais, que je sache, un Aréquipénien n’a fait un vers.

— Mais, cousine, songez donc que, pour comprendre toutes les beautés qui nous environnent, pour que notre ame en soit profondément émue, il ne faut pas que nous soyons livrés aux agitations du monde, et qu’il faut, si l’on veut peindre ces beautés, cultiver son intelligence, s’exercer à manier sa langue, lire de bons livres. Avant que vos Aréquipéniens ne fissent des vers, il faudrait qu’il y eût des écoles où ils pussent apprendre à lire et où ils pussent se former le goût par la lecture d’Homère et Virgile, de Racine et de Byron. Il