Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, II.djvu/223

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
219

Emmanuel m’engagea à aller visiter le camp ; mon oncle voulut bien m’y accompagner, et nous partîmes : je trouvai les chicherias, la maison de Menao presque entièrement détruites, et le camp dans le plus grand désordre. À l’aspect des lieux, on les aurait crus occupés par l’ennemi ; les champs de maïs étaient ravagés ; les pauvres paysans avaient été obligés de fuir ; leurs cabanes étaient remplies de ravanas. À l’état-major, je vis ces beaux officiers, ordinairement si élégants, sales, les yeux rouges et la voix enrouée ; la plupart dormaient, étendus sur la terre, ainsi que les soldats. Le quartier des ravanas avait le plus souffert ; l’artillerie de Morant, dans la confusion, l’ayant atteint, y avait tout culbuté ; trois de ces femmes avaient été tuées, et sept à huit autres grièvement blessées. Je ne rencontrai ni le général, ni Baldivia : ils dormaient.

À notre retour, mon oncle me dit : — Florita, j’augure mal de tout ceci ; je connais les gamarristes, ils ne sont pas gens à céder. Il y a, avec San-Roman, des hommes de mérite ; Nieto n’est pas capable de lutter de finesse avec eux. Sous ces dehors de cordialité, je serais bien trompé s’il ne se cache pas un piège.