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— Dites leur faire éprouver !… Il n’a donc aucune fortune, puisqu’il reste dans une carrière où il se torture lui-même et celle qu’il aime ?

— Pas de fortune ! il a en propre 5,000 livres sterling de rente, et sa femme, la plus riche héritière de l’Angleterre, lui a apporté 200,000 livres sterling ; elle est fille unique, et en aura encore deux fois autant à la mort de son père.

Je restai étonnée.

— Alors, monsieur, expliquez-moi donc quelle est la puissance qui oblige votre commandant à se tenir éloigné de sa femme pendant quatre ans, à mourir de consomption à bord de sa frégate, et à condamner une aussi belle personne à la douleur et aux larmes ?

— Il faut qu’il arrive à une haute position : notre commandant n’a obtenu du père cette riche héritière qu’à la condition de poursuivre sa profession jusqu’à ce qu’il fût fait amiral ; le jeune homme et la jeune fille y ont consenti : tous les deux ont promis, et pour accomplir cette promesse il doit parcourir les mers au moins dix ans encore ; car c’est à l’ancienneté que, chez nous, se font les promotions.

— Ainsi, monsieur le commandant se croit