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cette première rencontre, encore plus fanfaron et peureux que celui des Aréquipéniens. Vers onze heures du soir, madame Denuelle fit sentir à tous ces visiteurs que je devais avoir besoin de repos ; ils se retirèrent à mon grand contentement : je n’y tenais plus, j’en avais la tête cassée. M. Smith me dit qu’ayant remis lui-même à ma tante, la belle Manuela de Tristan, femme de mon oncle don Domingo, alors gouverneur d’Ayacucho, la lettre qui lui était adressée, elle l’avait prié d’aller la prendre, parce qu’elle voulait venir me voir le soir même. Elle vint donc aussitôt que je fus libre des autres visites : je trouvais cette attention très délicate de sa part.

D’après tout ce que j’avais entendu dire de la beauté extraordinaire de ma tante de Lima, je m’attendais naturellement à voir une femme superbe ; néanmoins la réalité surpassa à mes yeux tout ce que j’avais imaginé. Oh ! ce n’était pas là une créature humaine ; c’était une déesse de l’Olympe, une houri du paradis de Mahomet, descendue sur la terre ! A la vue de cette divine créature, je fus saisie d’un saint respect : je n’osais la toucher ; elle avait pris ma main qu’elle tenait dans les sien-