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douce influence : les parfums des fleurs, les chants des oiseaux me la font ressentir : je l’éprouve à la vue du géant de la forêt, dont la cime s’élance au séjour des orages ; de la grace sauvage de l’animal indompté ; à l’apparition d’un homme tel que le commandant de la Challenger, d’une femme telle que ma tante Manuela : et en présence de la beauté, de ce sourire des dieux, palpitante d’admiration, de plaisir, mon ame s’élève vers le ciel. Ma belle tante insista beaucoup pour que j’allasse demeurer chez elle ; je la remerciai, m’excusant sur la gêne que je pourrais lui occasionner ; comme il était très tard, nous remîmes la décision au lendemain. Après son départ, madame Denuelle resta à causer avec moi, en sorte qu’il était plus d’une heure quand je me trouvai seule.

Je ne suis jamais arrivée dans un pays, que je n’avais pas encore vu, sans en ressentir une agitation plus ou moins vive ; mon attention, presqu’à mon insu, se porte sur tout ce qui m’entoure, et mon ame, avide de connaître, de comparer, à tout s’intéresse. La succession de personnes et de choses qui étaient passées devant moi depuis mon débarquement au Callao