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gera, d’après cet exposé, de la justesse de l’observation.

La saya, ainsi que je l’ai dit, est le costume national ; toutes les femmes le portent à quelque rang qu’elles appartiennent ; il est respecté et fait partie des mœurs du pays, comme, en Orient, le voile de la musulmane. Depuis le commencement jusqu’à la fin de l’année, les Liméniennes sortent ainsi déguisées, et quiconque oserait enlever à une femme en saya le manto qui lui cache entièrement le visage, à l’exception d’un œil, serait poursuivi par l’indignation publique et sévèrement puni. Il est établi que toute femme peut sortir seule ; la plupart se font suivre par une négresse, mais ce n’est pas d’obligation. Ce costume change tellement la personne et jusqu’à la voix dont les inflexions sont altérées (la bouche étant couverte), qu’à moins que cette personne n’ait quelque chose de remarquable, comme une taille très élevée ou très petite, qu’elle ne soit boiteuse ou bossue, il est impossible de la reconnaître. Je crois qu’il faut peu d’efforts d’imagination pour comprendre toutes les conséquences résultant d’un état de déguisement continuel, que le temps et les usages ont con-