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rie, elle ne prend pas le nom de son mari, elle garde le sien, et toujours reste maîtresse chez elle ; lorsque le ménage l’ennuie par trop, elle met sa saya et sort comme les hommes le font en prenant leur chapeau ; agissant en tout avec la même indépendance d’action. Dans les relations intimes qu’elles peuvent avoir, soit légères, soit sérieuses, les Liméniennes gardent toujours de la dignité, quoique leur conduite, à cet égard, soit, certes, bien différente de la nôtre. Ainsi que toutes les femmes, elles mesurent la force de l’amour qu’elles inspirent à l’étendue des sacrifices qu’on leur fait ; mais comme, depuis sa découverte, leur pays n’a attiré les Européens à une aussi grande distance de chez eux que par l’or qu’il recèle, que l’or seul, à l’exclusion des talents ou de la vertu, y a toujours été l’objet unique de la considération et le mobile de toutes les actions, que seul il a mené à tout, les talents et la vertu à rien, les Liméniennes, conséquentes, dans leur façon d’agir, à l’ordre d’idées qui découle de cet état de choses, ne voient de preuves d’amour que dans les masses d’or qui leur sont offertes : c’est à la valeur de l’offrande qu’elles jugent de la sincérité de l’amant ; et leur va-