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ment recommencer les mêmes excuses ; répéter à satiété que je ne mangeais ni soupe ni viande, et que ma nourriture se bornait habituellement aux légumes, aux fruits et au laitage. On reste deux heures à table ; pendant ce temps, la conversation roule sur l’excellence des mets, et les éloges qu’on adresse, en termes pompeux, au maître de la maison. Comme à Aréquipa, on a aussi l’habitude de se faire passer des morceaux au bout de la fourchette ; cependant cet usage se perd. Ce que j’ai vu manger dans ces occasions est vraiment monstrueux. Il en résulte qu’à la sortie du repas presque tous les convives sont malades et dans un tel état de stupeur, qu’ils sont incapables de dire un mot. En définitive, leurs festins sont aussi fatigants que nuisibles à la santé. La profusion qu’ils y étalent dénote un peuple réduit encore aux jouissances sensuelles. L’heure habituelle du dîner n’est pas changée ces jours-là ; on se met à table à trois heures, comme c’est l’usage de Lima ; mais l’on n’en sort qu’à cinq ou six heures ; ensuite, il faut tenir compagnie, pendant une heure ou deux, aux maîtres de la maison ; on peut juger quelles corvées étaient, pour moi,