Page:Flora Tristan - Peregrinations d une paria, 1838, II.djvu/451

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dans le plus fort de l’action, la colère que j’éprouvais de voir l’inertie, la lâcheté des hommes que je commandais me faisait écumer de rage, et alors mes attaques arrivaient. Je n’avais que le temps de me jeter à terre ; plusieurs fois j’ai été foulée aux pieds des chevaux et emportée comme morte par mes serviteurs. Hé hien ! Florita, croiriez-vous que mes ennemis se sont servis contre moi de cette cruelle infirmité, de manière à me discréditer dans l’esprit de l’armée : ils annonçaient partout que c’étaient la peur, le bruit du canon, l’odeur de la poudre qui m’attaquaient les nerfs, et que je m’évanouissais comme une petite marquise de salon. Je vous l’avoue, ce sont ces calomnies qui m’ont endurcie. J’ai voulu leur faire voir que je n’avais peur ni du sang, ni de la mort. Chaque revers me rend plus cruelle, et si… Elle s’arrêta, et, levant les yeux vers le ciel, elle semblait s’entretenir avec un être qu’elle seule voyait ; puis elle dit : « Oui, je quitte mon pays pour ne jamais y revenir, et, avant deux mois, je serai avec vous… » Quelque chose qui n’appartenait pas à la terre pouvait seul donner l’expression qu’avaient ses traits en prononçant ces paroles. Je la considérai