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RICHE OU AIMÉE ?

— Pourtant, il lui fait la cour, voyons, cela crève les yeux.

— Si elle avait cinquante mille francs de rente, oui, on pourrait dire qu’il lui fait la cour ; mais dans sa situation actuelle, qu’il connaît, ce n’est même pas un flirt, rien que de la camaraderie.

— Qu’en savez-vous ?

— Ce qu’il m’a appris de ses intentions, et ce que Gisèle lui a dit des siennes, un jour, devant moi. Ils sont pauvres l’un et l’autre ; l’un et l’autre en souffrent secrètement, et demanderont au mariage la fortune, ils ne s’en cachent pas.

— Il serait raisonnable d’agir ainsi, fit Mme d’Azas, mais auront-ils la sagesse de le faire. Ils semblent peu sérieux. Enfin, il faut espérer que, si jamais ils avaient la folle idée de s’épouser, ma tante de Lacourselle, qui sait ce que c’est que la gêne et la privation, aurait l’énergie de s’opposer à cette union qui, dans leurs positions, annoncerait de la démence ; ce serait le mariage de la faim et de la soif !

— Hélas ! oui, fit Mme de Vauteur ; mais, c’est dommage, car ils sont bien gentils tous deux et se conviendraient à merveille.

Par hasard, André, ayant oublié des hameçons, était revenu les chercher dans la véranda attenante au salon. Sa tante et sa cousine ne l’avaient ni vu ni entendu rentrer, et, sans le chercher ni le vouloir, il surprit presque toute leur conversation.

Elle l’amusa beaucoup ; elle était vraiment bonne, la cousine d’Azas, de s’inquiéter de lui au point de s’occuper de son sort ; mais elle était bien naïve aussi de croire qu’un homme comme lui se condamnerait de gaité de cœur, et pour toute la vie, à une pauvreté dont, après avoir connu autre chose, il avait fait l’expérience !

Épouser Gisèle ! il n’y pensait pas plus qu’elle n’y pensait elle-même ! et c’était tout dire ! Aussi se promit-il, pour la faire rire, de lui raconter tout ce qu’il avait entendu. Lorsqu’il revint auprès d’elle, elle était debout au bord de l’eau et Suzanne, à côté d’elle, tenait une longue canne à pêche.

— Arrivez, cousin André, lui cria de loin la