Page:Florens - La Protection légale des animaux en France, 1890.djvu/26

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arrêtés préfectoraux, tels que collets, espérinques, lacets, raquettes, pièges dits léques, etc., qui détruisent des millions d’oiseaux, après les avoir fait horriblement souffrir.

Il serait à désirer que la chasse aux oiseaux de passage au moyen du filet ou de la glu fût réglementée de manière à empêcher la destruction des oiseaux utiles, mais la prohibition absolue de ce mode de chasse ne me paraît pas indispensable ; j’en dirai autant de la chasse au poste qui s’attaque surtout aux granivores. L’essentiel est de ne pas rompre l’équilibre que la nature a établi entre la production et la destruction ; ce qu’il faut, c’est ne pas créer au profit des insectes nuisibles une prépondérance qui est pour beaucoup dans les maladies dont sont atteints les végétaux : pour cela, il est nécessaire d’introduire dans la loi sur la police de la chasse des pénalités sévères et corporelles contre ceux qui détruisent les œufs et les couvées de petits oiseaux ; la loi de 1844 ne parle que des œufs et couvées des faisans, des perdrix et des cailles ; on devrait généraliser cette défense à tous les nids des petits oiseaux, au lieu de laisser aux préfets le soin de prendre des arrêtés à cet égard ; la protection des jeunes couvées serait bien plus assurée, surtout si des peines sérieuses étaient appliquées aux délinquants.

La chasse en temps de neige devrait aussi être formellement interdite par la loi, de même que la destruction de tous les oiseaux qu’un règlement d’administration publique déterminerait comme utiles à l’agriculture ; enfin, la construction, la vente de tout engin considéré comme instrument de chasse des oiseaux utiles, devrait être rigoureusement, défendue. On concilierait ainsi l’intérêt agricole avec le plaisir de la chasse qui, faite dans des conditions normales, est à la fois l’exercice d’un droit naturel et une distraction des plus légitimes.

Il fut un temps où l’on procédait judiciairement contre les animaux nuisibles ou malfaisants ; dans son commentaire de la loi du 24 décembre 1888, M. Carré (page 52) nous apprend que de 1120 à 1321, on compta quatre-vingt-quatorze procès intentés directement à des taureaux, à des vaches, à des juments, et même à des limaces ; en 1403, à Meulan, près Versailles, une truie qui avait dévoré un enfant, fut condamnée solennellement à être pendue et fut exécutée par un bourreau venu exprès de Paris, à qui l’on accorda 54 sols pour frais de voyage. Les chroniques du temps nous rapportent que des évêques de Lausanne prononçaient même l’excommunication des animaux malfaisants ; cer-