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Page:Florian - Fables, Havard.djvu/2

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NOTICE

SUR

FLORIAN.

—o—

Un homme dont le nom nous échappe en ce moment a dit avec beaucoup plus d’esprit que de justice : « Tous. ceux, qui ont voulu faire des fables après la Fontaine étaient des bêtes que la Fontaine lui-même n’aurait pu faire parler. » La sentence est sévère, quelque peu brutale, voire même exclusive, mais les Muses, Apollon lui-même, ont plus de politesse et de savoir-vivre : ils admettent des degrés dans cet art si difficile de rimer, dans cette difficulté vaincue où l’opiniâtre travail rend inaperçu le travail le plus opiniâtre. Or, si l’on ne peut pas dire que sur le Parnasse le soleil luit pour tout le monde, qu’il y a place pour chacun, on peut dire que tout poète qui a reçu du ciel quelque étincelle du feu secret peut espérer y voir inscrire son nom, mais à la place marquée par le dieu dont l’arrêt, par exemple, est inflexible. La, on ne peut en rappeler ! C’est sans inconvénient, l’équité y règne, et, au rebours d’ici-bas, la justice, y est toujours juste. Admirons, car, comme l’a dit un célèbre comédien : « C’est une bien belle chose que la justice… quand elle est juste.» Eh bien ! cher Florian, votre ombre doit se raviver à notre préambule. Oui, rassurez-vous’, ami, vous n’êtes point oublié parmi nous ; un espace immense vous sépare de la Fontaine ; mais que d’autres, bon Dieu ! en sont si loin, que, même avec une longue-vue, on ne peut les apercevoir. C’est consolant, n’est-ce pas ? Oui, oui, répondez-vous, et c’est franchise dans votre bouche, car, quoique vous ayez porté l’épaulette de dragon, vous êtes né simple et modeste, tendre et doux, et c’est sans doute dans la crainte d’effrayer vos moutons et plus encore vos bergères, que dans vos bergeries, je veux dire votre Galatée et votre Estelle et Némorin, vous n’avez point introduit de loups. C’est très-bien, vous vous êtes étudié, mesuré, jaugé, et c’est un exemple que, pour la rareté du fait, nous nous complaisons à citer. Vous n’avez pas tenté de vous élever au ciel, parce que vous vous êtes dit : Plus on tombe de haut et plus on se fait de mal, plus on risque de se briser. On le voit, la Fontaine vous a conseillé dans une journée de recueillement. Et vous vous êtes souvent répété :