Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/100

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même, la pose qu’a prise ici le Bodhisattva sous forme de Buddha assis à l’indienne, la main gauche reposant dans son giron, tandis que sa main droite, dérangée de la pose de la méditation, s’abaisse, la paume en dedans, et touche du doigt la terre…, suffira pour désigner cette minute ineffable sans qu’il soit davantage besoin d’apparitions monstrueuses ou lascives[1]. » Il semble, en vérité, que l’on assiste à l’ingénieuse incarnation de l’inexprimable.

Avec quelle sûreté l’artiste gandharien saisit le caractère essentiel d’une scène légendaire et sait en distribuer les éléments, de nombreux exemples nous permettent de nous en rendre compte, et la comparaison de ses œuvres avec les vieux médaillons des stupas est bien caractéristique encore à cet égard. La donation du Jetavana, telle qu’elle est figurée sur la balustrade de Bharhut (Pl. XII), est pittoresque, plaisante, énigmatique. Des arbres schématiques, des chariots d’or monnayé sont entassés les uns à côté des autres. Des assistants édifiés se pressent malaisément dans la partie gauche de la composition. Le Bouddha, bien entendu, n’y figure pas, mais le donateur non plus. On saisit là un trait essentiel de cet art, la prolixité, la confusion, l’impuissance à dégager, à composer, et aussi, il faut bien le reconnaître, une espèce de charme enfantin. Un relief gandharien de la collection de Mardan sur le même sujet (même pl.) présente avec le médaillon de Barhut le contraste le plus évocateur :

  1. Foucher, op. cit., pp. 411-413.