Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/101

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tout élément pittoresque a disparu ; les personnages importants, drapés comme des sénateurs romains, sont distribués avec un ordre, avec une autorité de l’accent le plus classique. Le Bouddha nimbé reçoit des mains du riche marchand le vase d’or, symbole de la donation. Quatre autres figures les encadrent, mais c’est au Bouddha et au donateur que va spontanément l’attention.

Le relief, la puissance plastique de cet art gandharien sont extraordinaires. De la matière il fait saillir avec force, non de pâles dessins sur pierre, mais des formes vivantes. Le bas-relief confine au haut-relief, presque à la ronde bosse. Grande nouveauté dans l’art de l’Inde, jusqu’alors plus graphique que sculptural. Cela, c’est proprement le don méditerranéen, le sceau du génie hellène, cet athlétique modeleur de volumes. Dans cette évolution, il y a quelque chose d’analogue au passage de l’art roman à l’art gothique. L’art roman sommeille encore dans la matière, à la surface de laquelle il fait courir, par ondulations légères, des méandres de figures emblématiques. Il modèle par méplats, distribue des indications d’ombres selon un système d’accents percés à la tarière. L’art gothique extrait les volumes des profondeurs, les amène à la lumière, les dote d’une vie organique et dramatique. Il est vrai que l’art gandharien reste baigné d’une onction mystérieuse, le calme répandu sur les images qu’il a enfantées est une de ses vertus les plus prenantes et les plus solennelles. Mais il est solidement