Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/156

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tout, en Chine, en Iran, en Russie, au pays de Roum, et jusqu’aux boulevards de la Germanie, plus tard dans l’Inde. Partout sa stratégie inflexible culbute l’adversaire. En pays conquis, il laisse derrière lui un fonctionnaire désarmé, un bureaucrate à la chinoise, que la terreur du nom mongol entoure d’une inviolabilité d’airain, et dont la tache consiste à dénombrer les troupeaux, à les marquer, à régler la bonne marche d’une fiscalité savante, à faire respecter le Yassak, le Règlement. Nulle tyrannie morale, nul despotisme exercé sur les consciences, la tolérance la plus large en matière religieuse. Certaines impératrices mongoles furent chrétiennes. Kit-Bouka, élève et lieutenant de Souboulaï, qui fut vaincu par Bibars en Syrie, dans une lutte où le fanatisme islamique triompha pour la première fois du tolérantisme touranien, était chrétien lui aussi. Bouddhistes, nestoriens, musulmans, païens pratiquèrent longtemps leur culte en liberté dans toute l’étendue de l’empire.

Ainsi les Mongols ne se présentaient pas comme des tyrans de la pensée et comme des dévastateurs. Dans leurs vieilles bandes, toutes les races et toutes les croyances, toutes les langues aussi, et presque tous les âges du monde, représentés par les divers degrés de la civilisation. Avec eux, des routiers chinois combattirent en Syrie. On peut imaginer ce qu’un pareil déplacement de peuples suppose d’échanges et de contacts. Eux-mêmes, en dehors de leur stratégie et de leur patriotisme qui ne faiblirent jamais, délais-