Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/16

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Des religions à faible contenu métaphysique et mystique ne sauraient s’en passer. Le Confucianisme, j’entends le Confucianisme le plus sec, le plus détaché des rêveries sur l’absolu, donna un développement immense à la musique et fit naître une peinture propagatrice de bons exemples et de légendes édifiantes. Pour refréner l’idolatrie, fortifier la croyance au Dieu unique chez des nomades attachés aux petits dieux des tribus, et aussi par un scrupule qui prend sa source dans la magie, Mahomet proscrivit la représentation des êtres vivants : de cette interdiction, analogue sans doute à celle qui favorisa l’art décoratif du bronze dans l’Europe du nord, devait sortir une prodigieuse géométrie de formes abstraites. Le génie imagier des Iraniens ne put s’y plier : il se réfugia à l’intérieur d’un schisme, qui eut son art propre, comme ses règles, ses rites, toute sa liturgie. Les religions du renoncement, comme le Bouddhisme et le Christianisme, malgré leur indifférence aux vanités, ont créé une étonnante et luxueuse iconographie, et, il est curieux de le noter, c’est au moment même où la première était amenée par Nagarjuna à sa systématisation métaphysique la plus abstraite que les artistes gandhariens la dotaient de ces images vivantes, concrètes et populaires qui allaient la répandre au loin en Asie[1].

L’étude des rapports de l’art et de la religion a été rendue plus facile et plus féconde par la méthode sociologique et par la manière dont elle a traité ce que nous

  1. V. Grünwedel, Mythologie de Buddhisme au Tibet et en Mongolie, trad. franc., p. 34.