Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/197

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

à la grande poésie du paysage Asikaga. Un profond respect de l’art les soutient, la puissance continue du souffle idéaliste leur manque, ils ne sont pas baignés par le vent des cimes. Parfois même, en étudiant leurs œuvres, surtout celles de Kô-rin, on a l’impression de se trouver en présence de spirituels archaïsants très habiles. Une profonde étude des choses japonaises, des fleurs, des rochers, des oiseaux, vus et observés avec une fraîche sincérité, les sauve du maniérisme.

Il semble que nous nous éloignions de plus en plus des sources vives du Bouddhisme et des grandes inspirations religieuses et naturalistes. L’académisme Kano, sous les Tokougawa, dessèche l’art à force de copies, de formules et de redites. Une société voluptueuse et riche s’abandonne au plaisir. Le génie japonais court-il le risque de s’énerver et de s’anémier ? La naissance de l’école vulgaire, le succès de l’estampe, ces deux grands faits de l’art du XVIIIe siècle, lui ont-ils rendu un sentiment profond et vrai, garant et preuve de sa vitalité ?

Nous ne sommes pas sur un point quelconque de l’Asie. Ce peuple est extraordinaire par la constance, par la discipline, par la force de renouvellement. Le régime Tokougawa a pu jeter sur ses vertus anciennes un voile un peu lâche et bariolé : mais il conservait au plus profond de son cœur les enseignements des Asikaga et, en même temps, une foi profonde dans l’avenir de la nation et dans l’idéal asiatique. Le samouraï Tokougawa, à force de se modeler sur les