Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/196

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qui traduit les besoins d’une aristocratie récente, son goût pour le luxe et la prodigalité. Il ne cherche plus ses modèles chez les Song, il remonte plus haut, les splendeurs des Thang l’éblouissent. Il invente une technique nouvelle pour les applications d’or : accompagnées d’une chaleureuse gamme de jaunes, d’orangés, de rouges, elles flamboient avec majesté. Ei-tokou, deuxième fils de Chô-ei, est encore un Kano, mais galvanisé, enrichi, vivifié par la vigueur d’un grand renouveau historique. Sur les murailles des palais d’Hideyosi, se répandent de merveilleux mirages sur fonds d’or, que rehausse encore un savant emploi des glacis. L’étude de la nature aboutit au pur décor, au beau paraphe ornemental, à de grandes symphonies colorées, délicieuses et vides, absolument opposées au pénétrant idéalisme Zèn.

Il restait encore une vieille aristocratie jalouse et fermée, serrée autour de l’empereur, fidèle à ses traditions et à ses peintres. L’école de Tosa n’était pas absolument morte, mais déchue de son antique grandeur et comme reculée dans l’ombre des âges. Des maîtres comme Kô-etsou, Sô-tatsou et Kô-rin ressuscitèrent ses plus captivants prestiges et, dans leur analyse passionnée des peintres anciens, ils furent sensibles aussi à l’émouvante austérité des Asikaga. Suaves et ardents coloristes, ils eurent le don d’une éblouissante technicité, mais ils surent en dépasser les prodiges en parvenant à rester simples. Souvent quelques masses, des effets largement lavés leur permettent d’atteindre