Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/84

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disposition de Mahinda et de ses compagnons un parc proche de sa capitale, et nous aurons un sentiment vrai de ces commencements : « Et il était beau à voir et riche en ombre, paré de floraisons et de fruits vraiment délicieux… Là il y a un bel étang de lotus, couvert de fleurs de lotus, des blanches et des bleues, là il y a des eaux fraîches en de belles fontaines, parfumées de douces fleurs… » Un pareil texte propage jusqu’à nous un précieux écho, une note pénétrante de cette poésie naturaliste qui baigne le Bouddhisme dès ses origines et qui le distingue de toutes les religions. Ce goût exquis des solitudes, cette sensibilité qui s’exprime avec tant de naïve grâce, quelle promesse pour l’art !

Mais ces parcs ne sont pas l’unique asile de la méditation érémitique. Il y a aussi les cellules creusées dans le rocher et superposées en étages, antiques rendez-vous des moines pour la saison pluvieuse. L’architecte rupestre qui, au flanc des Ghâts, a creusé les prodigieux temples souterrains a su aussi évider des monastères dans la matière même de la montagne. Ainsi, selon les lieux et les temps, l’aspect du sangharama est appelé à se modifier. Le couvent de la plaine n’est pas le même que le couvent de la colline, mais l’un et l’autre restent fidèles à l’esprit des données primitives. Peu à peu, le monastère bouddhique de l’Inde prit le caractère d’une grande exploitation rurale (Pl. VI). À mesure que sa population croissait en nombre, les celliers et les magasins destinés à abriter