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Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/109

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plus de pierres tomber de part et d’autre, s’estant des enfans bandez en deux handes l’une contre l’autre, lesquelles ils jettoient pour lors, bruiant ces pierres en l’air, tant elles estoient poussées roidement, par grand force, et la multitude d’icelles obscurcissoit quasi le Soleil. Avec ce sillement de pierres le bruit de voix de ces enfans estoit aussi merveilleux, tellement qu’un tonnerre n’eust scen faire un plus grand tintamarre. Là Balde ne faillit à se trouver, et estre de l’une des parties, et s’advance fort avant devant ses compagnons, et avec une fronde fait ronfler ses cailloux, donne courage aux siens, et la meslée se fait si aspre, que la poussiere obscurcit tout l’air ; et, se mettant trop avant dedans ses ennemis, il reçoit un mauvais coup sur la feste, comme il advient aux vaillans Capitaines. Mais, pour cela, il ne se retire point, et prend davantage courage, ayant veu son sang, et lait comme le poivre, qui tant plus est pilé, plus renforce son odeur, ou comme la palme, laquelle s’estere, plus elle est chargée. Aussi, desire-il estre plustost enfouy dedans un monceau de pierres, que tourner le dos à la semblance d’un couard. Enfin, teile bataille finie, il s’en retourne au logis, tout baigné de sang, se ruë sur les premiers œufs qu’il trouve, d’une partie desquels il fait un retraintif sur sa playe, et de l’autre il appaise sa faim. Mais sa mere, le voyant en tel equipage, s’attriste fort, et l’amitié qu’elle luy portoit la fait desesperer de luy. Mon fils, mon fils, dit-elle, je te prie pourquoy te tourmentes-tu tant ? Ha, pour l’amour de Dieu, arreste-toy : laisse là ces pierres : quitte ces batteries ! Il semble à te voir que tu aves une face de Diable, tant tu es deschiré, et as la face toute plombée de coups. » Balde luy respond : « Voulez-vous, ma mere, que je souffre qu’on me die que je suis bastard, un mulet, un souillon de cuisine, un fils de putain ? Perdray-je ainsi nostre commune renommée ? Y a-il un outrage pire que celuy-cy ? Vous vous souciez trop peu, ma mere, de l’honneur de nostre maison. Je me