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Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/72

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tours et les Palais et maisons magnifiques espiées de longues banderolles, et guidons de toutes sortes de couleurs.

Chascun fait dresser son pavillon et ses tentes, et s’employe à donner habilement ordre à son faict. Toutes les rues sont pleines de peuple. Les uns preparent et accommodent leurs armes : autres font ferrer leurs chevaux : autres se donnent du bon temps, rient, chantent, dansent. On n’oit que fiffres et tabourins resonner par tout ; mesmes les cloches ne sont espargnées pour par leur son et carillonnement rendre ceste feste plus gaillarde. Jour et nuict les portes de la ville sont ouvertes, entrans par icelle continuellement des bandes de gendarmes. Enfin en peu de temps l’amas se faict bien grand de toutes les parties de l’Europe, remplissant tous les environs de Paris. On y void grand’bande d’Allemans, d’Espagnols, et d’Italiens. Il ne peut avoir au monde tant de canaille qu’il y avoit lors à Paris, de Seigneurs et Barons ; et estoit chose merveilleuse de veoir ensemble tant de chevaux. Les Palais, les escuries, hosteleries et tavernes, estoient pleines. Les uns, gargoüillant à table, s’esclatoient de rire ; autres, en leurs bouticques et maisons, martelloient, aiguisoient, fourbissoient, et accommodoient armes. Pendant qu’un chascun s’occupoit ainsi, Balduine, pour l’amour qu’elle portoit à son ami Guy, attendoit de grande affection ceste journée, ainsi que follement la Synagogue des Juifs attend encore le Messias : car elle desiroit fort de veoir comme cet homme briseroit ses lances ; combien d’hommes il jetteroit par terre. Icelle, estant accompagnée d’une belle et grande. troupe de filles, de cent dames, et cent Duchesses, se presenta sur son eschaffaut, vestue d’une robbe brochée d’or, qui rehaussoit merveilleusement la beauté des tapisseries riches, dont estoit tendu l’eschaffaut. Chascun soudain jette sa veue sur elle, et admiroit la beauté de sa face, laquelle, ressemblant en sa couleur naturelle le