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Page:Folengo - Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, 1859.djvu/81

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suivies d’une vilaine ruyne. Guy, humiliant sa face, receut ce beau present, digne certes du travail qu’il avoit prins ; et, en le prenant, baisa la main du Roy en s’inclinant fort bas. Puis marchent vers le Palais, estans suivis d’une grand’trouppe de personnes, les trompettes et les fiffres sonnans tousjours devant. Or le soleil, las de son chemin journal, se cachoit des-ja soubs les ondes pour se reposer, et laissoit sa sœur enceinte de son amy ; et cependant on donne ordre au soupper Royal. On oit, par les cuisines, des deschiquetis, des cliquetis de cousteaux, des tintamarres des chaudrons, et poisles. Les entrées d’icelles, couvertes de portiques, se voyent rendre la fumée en dehors, et sont souillées tousjours d’eaux, et de graisses. De là sortent plusieurs odeurs de chairs rosties, et houillies, lesquelles aiguisent l’appetit de ceux, qui les sentent. Il y a en icelles plus de cent serviteurs obeissans aux cuisiniers : une partie d’iceux portent le bois, autres esgorgelent, autres font bouillir les poisles et chauderons l’un tue un cochon, l’autre des poulets, cestuy-cy estrippe, l’autre escorche, un autre plume en eau chaude des chappons ; cestuy faict bouillir testes de veau avec la peau ; autre embroche des petits cochonnez, tirez encore quasi du ventre de la truye, après estre lardez. Celuy qui commandoit en qualité de maistre cuisinier, se nommoit Chambo, lequel estoit subtil et inventif à trouver friandises de gueule, et plaisantes au palais. Iceluy, presidant en une chaire, commandoit entierement à tous les cuisiniers, et quelques fois battoit la canelle et pilloit l’espice sur le dos des marmittons et souillons de cuisine. Il y en avoit un, qui fricassoit avec du land les foyes des poulailles : un autre, sur les fricassées, asperge du gyngembre et du poivre : un autre fait une saulse jaune aux oyscaux de riviere. Un autre tire destremement les faisans, après avoir tasté du bout du doigt, s’ils sont bien cuits. Cinq autres ne font que tourner le moulage de cuisine, d’où coulent les amandes et saulses poivrées. Autres tirent du