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M. DE FONTANES

teaubriand a dit que son indignation avait l’éclat de son courage, fut tué dans un duel, à peine âgé de vingt-huit ans. La tendresse de M. de Fontanes en reçut un coup d’autant plus sensible qu’il dut être plus renfermé.

M. de Châteaubriand, à l’époque où il forma, avec le duc le Richelieu, le premier ministère Villèle, avait voulu rétablir la grande-maîtrise de l’Université, en faveur de M. de Fontanes. Au moment où il partait pour son ambassade de Berlin, il reçut ce billet, le dernier que lui ait écrit son ami :

« Je vous le répète : je n’ai rien espéré, ni rien désiré, ainsi je n’éprouve aucun désappointement.

« Mais je n’en suis pas moins sensible aux témoignages de votre amitié : ils me rendent plus heureux que toutes les places du monde. »

Les deux amis s’embrassèrent une dernière fois, et ne se revirent plus. M. de Fontanes fut atteint, le 10 mars 1821. dans la nuit du samedi au dimanche, d’une attaque de goutte à l’estomac, qu’il jugea aussitôt sérieuse. Il appela son médecin, et fit demander un prêtre. Le lendemain, il semblait mieux ; après quelques courtes alternatives, dans l’intervalle desquelles on le retrouva plus vivant d’esprit et de conversation que jamais, l’apoplexie le frappa le mercredi soir. Le prêtre vint dans la nuit : le malade, en l’entendant, se réveilla de son assoupissement, et, en réponse aux questions, s’écria avec ferveur : « Ô mon Jésus ! mon Jésus ! » Poète du Jour des Morts et de la Chartreuse, tout son cœur revenait dans ce cri suprême. Il expira le samedi 17 mars, à sept heures sonnantes du matin.

À deux reprises, dans la première nuit du samedi au dimanche, et dans celle du mardi au mercredi, il avait brûlé, étant seul, des milliers de papiers. Peut-être des vers, des chants inachevés de son poëme, s’y trouvèrent-ils compris. Il était bien disciple de celui qui vouait au feu l’Énéïde.

On doit regretter que les œuvres de M. de Fontanes n’aient point pu se recueillir et paraitre le lendemain de sa mort : il semble que c’eût été un moment opportun. Ce qu’on a depuis