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M. DE FONTANES

appelé le combat romantique n’était qu’à peine engagé, et sans la pointe de critique qui a suivi. Dans la clarté vive, mais pure, des premières Méditations, se serait doucement détachée et fondue à demi cette teinte poétique particulière qui distingue le talent de M. de Fontanes, et qui en fait quelque chose de nouveau par le sentiment en même temps que d’ancien par le ton. Sa strophe, accommodée à Rollin, aurait déploré tout haut la ruine du Château de Colombe, et noté à sa manière la Bande noire, contre laquelle allait tonner Victor Hugo. Les chants de la Grèce sauvée auraient pris soudainement un intérêt de circonstance, et trouvé dans le sentiment public éveillé un écho inattendu.

Aujourd’hui, au contraire, il est tard ; plusieurs de ces poésies, qui n’ont jamais paru, ont eu le temps de fleurir et de défleurir dans l’ombre : elles arrivent au jour pour la première fois dans une forme déjà passée ; elles ont manqué leur heure. Mais, du moins, il en est quelques-unes pour qui l’heure ne compte pas, simples grâces que l’haleine divine a touchées en naissant, et qui ont la jeunesse immortelle. Celles-ci viennent toujours à temps, et d’autant mieux aujourd’hui que l’ardeur de la querelle littéraire a cessé, et qu’on semble disposé par fatigue à quelque retour. Quoi qu’il en soit, ce recueil s’adresse et se confie particulièrement à ceux qui ont encore de la piété littéraire.

C’est une urne sur un tombeau : qu’y a-t-il d’étonnant que quelques-unes des couronnes de l’autre hier y soient déjà fanées ? J’y vois une harmonie de plus, un avertissement aux jeunes orgueils de ce qu’il y a de si tôt périssable dans chaque gloire.

(Sans parler des personnes dont les noms, cités en passant dans l’article, indiquent assez les obligations que je leur ai pour les renseignements biographiques, je dois remercier tout particulièrement M. de Langeac, un des plus anciens, des plus utiles amis de M. de Fontanes avant 1789, et qui, par un retour de fortune, lui dut ensuite de devenir conseiller ordinaire et chef du secrétariat général de l’Université ; et aussi M. Rousselle, aujourd’hui inspecteur général des études, longtemps attaché au cabinet de M. de Fontanes et assidu dans son intimité.)