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OEUVRES DE FONTANES.

Il cherchait Égérie au fond de leurs ombrages.
Ossian, au milieu des forêts, des orages,
Que l’Ecosse nourrit sur son sol inégal,
Célébrant dans la nuit les exploits de Fingal,
Offrait un chant de mort à son ombre chérie,
Qui, du haut d’un nuage, écoutait, attendrie.
On dit qu’en ces vieux temps, sous la voûte des bois,
La majesté des dieux apparut quelquefois ;
Les dieux, aux pieds du chêne, ont instruit plus d’un sage
L’aigle au vol prophétique apportait leur message ;
L’antre mystérieux entendit Apollon.
Tempé, séjour célèbre ! ô magique vallon,
Où l’eau de Sperchius, d’Amphryse et de Pénée
D’ombrages immortels roulait environnée,
Tu voyais tout l’Olympe errer sous tes berceaux ;
Pan, qui sut le premier réunir sept roseaux,
Diane au carquois d’or, à la robe légère,
Et des Nymphes, ses sœurs, l’élite bocagère,
Et l’heureux Jupiter qui, cachant sa grandeur,
Aimait à triompher de leur jeune pudeur ;
Cérès aux blonds cheveux, et le dieu des orgies,
Bacchus au front vermeil ceint de grappes rougies,
Et cette déité, charme de l’univers,
Vénus, qui de Lucrèce inspirait les beaux vers.
Mais tout changea, les dieux, leur culte, leurs oracles ;
Les bois désenchantés ont perdu leurs miracles ;
Ils ne sont plus ces jours où chaque arbre divin
Enfermait sa Dryade et son jeune Sylvain,
Qui versaient en silence à sa tige altérée
La sève à longs replis sous l’écorce égarée.