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ŒUVRES DE FONTANES.

L’autel garde leurs vœux sur des tables d’airain,
Et le seul désespoir habite leurs cellules.

Eh ! bien, vous qui plaignez ces victimes crédules,
Pénétrez avec moi ces murs religieux :
N’y respirez-vous pas l’air paisible des cieux ?
Vos chagrins ne sont plus, vos passions se taisent,
Et du cloître muet les ténèbres vous plaisent.

Mais quel lugubre son, du haut de cette tour,
Descend et fait frémir les dortoirs d’alentour ?
C’est l’airain qui, du temps formidable interprète,
Dans chaque heure qui fuit, à l’humble anachorète
Redit en longs échos : « Songe au dernier moment ! »
Le son sous cette voûte expire lentement ;
Et quand il a cessé, l’âme en frémit encore.
La méditation qui seule, dès l’aurore,
Dans ces sombres parvis marche en baissant son œil,
À ce signal s’arrête, et lit sur un cercueil
L’épitaphe, à demi par les ans effacée,
Qu’un gothique écrivain dans la pierre a tracée.
O tableaux éloquents ! Oh ! combien à mon cœur
Plaît ce dôme noirci d’une divine horreur,
Et le lierre embrassant ces débris de murailles
Où croasse l’oiseau chantre des funérailles ;
Les approches du soir, et ces ifs attristés
Où glissent du soleil les dernières clartés ;
Et ce buste pieux que la mousse environne,
Et la cloche d’airain à l’accent monotone,
Ce temple où chaque aurore entend de saints concerts