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ŒUVRES DE FONTANES.

Les premiers fondateurs des fameuses cités,
Par un fleuve, un ruisseau tout-à-coup arrêtés,
Terminaient les erreurs d’une pénible course,
Et saluaient le Dieu protecteur de la source.
Le puits se creuse enfin : le sceau retentissant
Et s’abaisse et remonte, et toujours redescend.

 Il est plus d’un pays dont les arides plaines
N’offrent au voyageur ni fleuves, ni fontaines ;
Tel de mes premiers ans fut le premier séjour.
Une seule Nayade, en s’y cachant au jour,
Dans le creux de la terre avait mis sa demeure ;
Le cylindre en tournant résonnait à toute heure,
Elle entendait le bruit, et, hâtant son chemin,
Montait légèrement, une cruche à la main.
Ses larges flots tombaient dans une auge profonde.
Que de fois, attirés par l’espoir de son onde,
Couraient de toutes parts le bouvier, le pasteur,
Et l’agneau dont les chiens excitaient la lenteur !
Quel tumulte ! On arrive, on se presse, on rassemble
Le bœuf et le coursier qui s’abreuvent ensemble.
J’entends bêler, hennir, et mugir le troupeau ;
J’entends surtout l’essaim des filles du hameau
Qui, d’un pas assuré, sur leur tête immobile,
Remportent le fardeau de la cruche d’argile :
L’écho du puits profond a redit leur gaité.

 Muse ! transporte-moi chez l’Arabe indompté,
Vers Damas, vers ces lieux où l’œil encore admire,
Dans leurs savants débris, Bagdad, Thèbe ou Palmire ;