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ŒUVRES DE FONTANES.

Montre sa fleur tardive à la fin de l’été.
Je ne cultive point l’arbre dont le feuillage
Du port de la tulipe est l’élégante image,
Ces tuyas, ces vernis, dont la Chine à grands frais
Pour orner Trianon, dépouilla ses forêts ;
Leur ombrage est stérile, et leur pompe étrangère
Loin du sol paternel en nos champs dégénère.
L’orgueil du cèdre même, aux yeux au jardinier,
Vaut-il l’humble arbrisseau qui remplit son panier ?

 Descends, belle Pomone, et daigne me sourire,
De ta serpette d’or viens étendre l’empire ;
Si tu reçus dans Rome un hommage divin
Comme les déités des moissons et du vin,
Quels honneurs aujourd’hui sont dus à ta couronne
De quels nobles amants la foule t’environne !
Daguesseau, Lamoignon, épris de tes appas,
Souvent ont pris ta bêche et n’en rougissaient pas ;
Tu vis sans cesse errer dans tes riants domaines
Haller, Jussieu, Linné, Tournefort, Desfontaines ;
Et la grave science, autour de tes autels,
Découvre, en se jouant, des secrets immortels.
Pomone ! exauce-nous ; à nos vœux sois facile.

 Plantez-vous un verger ? que le sol soit fertile.
Craignez l’aspect du nord et celui du couchant.
Que le sol, enfoncé par le boyau tranchant,
Laisse, en des creux divers, et des vents et de l’onde
Pénétrer à loisir l’influence féconde.
On ferme alors la fosse où l’arbre est transplanté ;