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ŒUVRES DE FONTANES.

Rendons-lui ses honneurs, désarmons sa colère ;
Mais qu’en nous accordant son appui tutélaire,
Ce Dieu muet et sourd, par d’heureuses rigueurs,
Divise les enclos, sans diviser les cœurs ;
Et que de la Pitié l’attendrissante image
Reçoive, auprès de lui, nos dons et notre hommage.

 Tout rang à ses devoirs, tout homme à ses destins :
À l’humble ami des champs, il faut d’humbles jardins ;
Le parc majestueux convient à l’opulence.

 Je veux que, déployé dans un espace immense,
Le parc autour de lui rassemble tous les arts,
Et de son noble aspect étonne mes regards.
Dès que les étrangers le verront apparaître,
Il doit leur annoncer la grandeur de son maître.
S’il montre avec orgueil, au penchant d’un coteau,
Un vieux bois dont le front couronne un vieux château,
S’il domine un beau fleuve, et, de lierre entourées,
Si d’anciens écussons quelques tours sont parées,
Je m’arrête, et m’écrie : Habitiez-vous ici,
Ô Dunois ! ô Nemours ! ô Bayard ! ô Couci !
Salut, mânes sacrés ! héros chers à la France !

 Cependant je m’approche, et je rêve en silence
Au pied de ces donjons, consacrés autrefois
Par d’illustres amours ou d’illustres exploits ;
J’entre au fond des bosquets : déjà le jour s’abaisse,
La nuit vient, je suis seul, et dans cette ombre épaisse
L’oreille du poëte entend de tous côtés