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LA MAISON RUSTIQUE.

Ces vieux parcs dont Le Notre inventa l’ordonnance ;
J’aime leur dessin pur et leur riche élégance,
Leur imposant abord, les doubles rangs d’ormeau
Qui dirigent nos pas vers ces nobles châteaux,
Où l’hospitalité, comme aux siècles antiques,
Semblait de son palais élargir les portiques,
Et découvrait de loin à l’œil du voyageur
L’asile du repos et celui de l’honneur.
Je retrouve en ces lieux les mœurs de nos ancêtres ;
Leur dignité brillait sous leurs abris champêtres :
Tout y fut régulier, sage, élégant comme eux.
Je ne dédaigne point, ainsi que leurs neveux,
Ces hauts murs de charmille à la verte fourrure,
Qui du vent de l’automne écartaient la froidure.
Je fais plus : je réclame, au lieu d’arbres lointains,
La treille aux pampres verts, doux abri des festins,
Ces salons de verdure, où la famille entière
En cercle allait jouir de l’ombre hospitalière ;
Le sol, le sable uni, cher aux pieds du vieillard,
Et ces bosquets en dôme arrondis avec art,
Qui jusqu’à l’horizon, sous leur voûte enfoncée,
Prolongeaient à la fois la vue et la pensée.
Vers le soir, les causeurs s’y donnaient rendez-vous ;
La marche était plus libre, et l’entretien plus doux :
C’était l’heureux tableau des sages d’Acadème.
Oui : de ces grands jardins l’harmonieux système
Eût autrefois charmé Pythagore et Platon :
C’est là, qu’en élevant leur esprit et leur ton,
Ils auraient enseigné ces doctes symphonies
Qui mesurent les pas des sphères infinies,