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ŒUVRES DE FONTANES.

Glaucus en est surpris, ses pas ont hésité ;
Mais il reprend bientôt sa première fierté.
Tel le chêne, un moment courbé par la tempête,
Tremble, et la brave encore en relevant sa têe.
La honte a ranimé sa fureur et ses sens.
Il fond sur Cynégire, et dans ses bras puissants,
Comme un nouvel Alcide, enlève un autre Antée,
L’y retient, et déjà la foule épouvantée
Croit que d’Euphorion le fils est abattu ;
Mais Eschyle à l’instant : « Que devient ta vertu,
« Mon frère ? venge-toi, la Grèce te regarde,
« Apollon que je sers te défend et te garde ;
« Songe au chant qu’il te doit, si ton bras est vainqueur. »
Ces mots de Cynégire enflamment le grand cœur,
Il redouble d’efforts, et, bouillant de colère,
Pèse sur les genoux de son fier adversaire,
Les ouvre à l’instant même en les frappant du sien,
Presse encore, et Glaucus qui n’a plus de soutien
S’étonne, hésite et tombe, et couvre au loin l’arène,
Chargé de son rival qu’en sa chute il entraine.
Il se débat en vain : Cynégire affermi
Enchaîne entre ses bras son robuste ennemi,
Le serre, et sous son poids l’opprime et le terrasse,
En triomphe, et l’oblige à lui demander grâce.
Aussitôt au vaincu le vainqueur tend la main,
Lui-même il le relève, il l’embrasse, et soudain
Saisit ce bouclier, le prix de sa victoire,
Et près d’Euphorion court jouir de sa gloire.

 On applaudit longtemps le père et les deux fils.