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ŒUVRES DE FONTANES.

Représente à nos yeux la force et la vertu :
Il nous apprend à vaincre ; et Lycurgue est l’emblème
De la loi qui commande à la force elle-même.

 Aux pieds des demi-dieux Amyclé soupirait,
Lorsque, seul avec moi, Léonidas parait ;
Nous quittions le sénat : la reine à notre vue
D’Hercule tout-à-coup embrassant la statue,
S’écrie : « Ô cher époux ! arrête, écoute-moi ;
« Par ce Dieu dont le sang m’anime comme toi,
« Par nos communs aïeux, par le chaste hyménée
« Qui depuis neuf printemps joint notre destinée,
« Par nos deux jeunes fils, après toi mon seul bien,
« Ouvre-moi tout ton cœur et ne me cache rien ;
« Des secrets d’un époux j’ai droit d’être informée.
« Ne sais-tu pas qu’ici Vénus même est armée,
« Et que, sans s’amollir dans l’ombre et le repos,
« Son sexe quelquefois marche auprès des héros ?
« Tu connais ma constance ainsi que ma tendresse ;
« Parle, Léonidas, ne crains point de faiblesse ;
« Je suis épouse et mère, et j’adore nos fils :
« Mais je descends d’Hercule, et Sparte est mon pays. »

 Léonidas se trouble, hésite et délibère
Entre les sentiments d’un monarque et d’un père,
Cède, et répond enfin ; « Généreuse Amyclé,
« Tu le veux, tout mon cœur te sera dévoilé.
« Rentre dans ton palais : son ombre solitaire
« De ce grand entretien doit cacher le mystère.
« Viens : je t’y conterai les volontés des Dieux. »