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LA GRÈCE SAUVÉE.

Qui pourra dignement raconter la vaillance
D’Alphée et de Maron, ces frères belliqueux,
D’Hélénus, leur ami, qui combat avec eux,
Et du chef Thespien, de ce brave Aristée ?
Ils s’élancent, tout cède, et leur main redoutée
A rompu du grand Roi l’immortel bataillon.
Près d’eux un sage augure, un prêtre d’Apollon,
Le vieux Mégistias, au bout de sa carrière,
Quitte sa lyre d’or pour la lance guerrière.
Le laurier prophétique orne encor ses cheveux.
Je combattais non loin de ces guerriers fameux.
Et Philétas aussi, qui dut être mon frère,
Qu’à ma sœur pour époux avait promis ma mère,
Combattait sous mes yeux pour la première fois.
Déjà de l’Orient il a frappé deux rois.
Hélas ! sous mille dards, il tombe à l’instant même,
Il tombe, et peut à peine, à son heure suprême,
Près de fermer les yeux, confier à mon cœur
Ses derniers sentiments qui sont tous pour ma sœur.
Je l’embrasse, il n’est plus : ma sœur infortunée
L’attend, et file encor les habits d’hyménée ;
Ses compagnes, peut-être, enviant ses destins,
Lui préparent des jeux, des danses, des festins ;
Ô deuil ! ô longs regrets ! son jeune époux succombe
Et le lit nuptial n’est pour lui qu’une tombe.

 Tu fus du moins vengé, malheureux Philétas !
Oh ! combien de Persans ont payé ton trépas !
Des bataillons entiers sous nos coups disparaissent,