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LA GRÈCE SAUVÉE.

Les mers s’offrent de loin à son triste regard,
Leurs eaux battent les murs qui ceignent le Pirée ;
De son plus vif éclat Diane s’est parée,
Et verse doucement sur un monde en repos
Ses rayons argentés qui tremblent dans les flots.
Tout dort profondément ; mais Elpinice veille :
Au bruit sourd de la vague elle prête l’oreille.
Et ramène souvent sa pensée et ses yeux
Du mouvement des eaux vers le calme des Cieux.
Longtemps l’infortunée a gardé le silence,
Puis tout à coup : « Ô mer ! ô solitude immense,
« Où s’égare celui que je n’ose nommer
« Et que pourtant mon cœur en secret ose aimer !…
« Donnez-moi des rameurs : que la voile s’apprête,
« Je veux l’atteindre ; allons, nul danger ne m’arrête…
« Je l’atteins, je le vois. Que les vents en courroux,
« Déchainés sur les eaux, grondent autour de nous ;
« Et par de là ces flots dont la Grèce est baignée,
« Que j’aborde avec lui dans quelque île éloignée !
« Il est, dit-on, des lieux où Vénus libre encor
« N’a point subi ces lois qu’ignorait l’âge d’or,
« Où peuvent s’avouer, sans détour et sans crime,

    lieu de présumer qu’Elpinice, fille d’Aristide, devait être l’héroïne du poëme, et que M. de Fontanes, voulant lui former un caractère touchant et nouveau, qui ne rappelât ni Armide, ni Didon, ni Velléda, s’était proposé de peindre la plus austère pudeur luttant contre la passion la plus violente. Quel eût été l’objet de cette passion et le dénouement de cet épisode ?… C’est ce dont malheureusement on ne trouve aucune trace bien que M. de Fontanes eût arrêté son plan à cet égard : mais il n’avait jamais voulu le communiquer.