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ŒUVRES DE FONTANES.

siasme qu’ils inspirent ; si on leur oppose quelques unes de ces productions barbares que les hommes de goût ont généralement condamnées, il est presque sûr qu’on n’a point reçu de la nature cette sensibilité dans les organes, et cette justesse dans l’esprit. sans lesquelles on ne peut bien parler des beaux-arts.

Jusqu’ici tous ceux qui les aiment avaient tourné leurs regards vers la Grèce comme vers leur patrie naturelle. L’imagination des poëtes, ainsi que celle des artistes, aimait à parcourir les ruines d’Athènes et cherchait l’inspiration autour des tombeaux d’Homère et de Sophocle. On nous apprend aujourd’hui que ce n’est point dans le climat le plus favorisé de la nature, chez le peuple le plus sensible, dans la plus belle de toutes les langues, que l’esprit humain a créé le plus de prodiges. C’est dans les montagnes de l’ancienne Calédonie, c’est dans les forêts habitées par les descendants d’Arminius, que se trouvera désormais le modèle du beau, et de je ne sais quel nouveau genre supérieur à tous les autres, qu’on appelle mélancolique et sombre : genre particulier à l’esprit du christianisme, et qui pourtant est très favorable aux progrès de la philosophie moderne. Ces opinions si étranges et si contradictoires forment un des principes fondamentaux de la poétique de madame de Staël. Avant de les réfuter, je me permettrai de faire quelques observations à ceux qui défendent son livre en l’honneur de la philosophie. et qui, dans ce moment, ne s’aperçoivent pas de leur méprise.