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DE LA LITTÉRATURE.

la poétique de madame de Staël. On voit par cet arrangement, et d’après la loi de la perfectibilité progressive, qu’elle n’occupe pas un rang médiocre. Il est donc vrai qu’en croyant se livrer aux plus grandes méditations, les femmes reviennent, en dépit d’elles, à leurs habitudes journalières ! Elles se croient tellement destinées à tout vaincre dans la société, que cette aimable illusion passe jusque dans leurs écrits. Tant que cet instinct naturel se borne à chercher de nouveaux moyens de plaire, il est très excusable et même intéressant : madame de Staël pourrait mieux qu’une autre faire sentir tout ce qu’on lui doit d’agréments ; mais, s’il change d’objet, s’il veut s’allier à l’esprit de secte et de faction, alors son charme disparaît et le danger commence.

C’est, sans doute, pour voir de plus haut et de plus loin que madame de Staël a pris une place si élevée. Mais, quand on veut tout observer du point le plus éminent, il faut bien connaître la portée de sa vue ; et, dans un vaste horizon, tout s’obscurcit ou se déplace, si elle manque de force, de précision et de netteté.

Une des plus singulières idées de son livre est sans contredit la distinction qu’elle établit entre la littérature du Nord et celle du Midi. Le génie d’Ossian, si on l’en croit, préside à la première, c’est-à-dire, à celle des Anglais, des Allemands, des Danois, des Suédois, etc. Homère domine la seconde, qui comprend les ouvrages français, italiens, espagnols, etc. Ceux qui connaissons l’histoire littéraire n’ont pas été