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Page:Fontanes - Œuvres, tome 2.djvu/205

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ŒUVRES DE FONTANES.

un climat brûlant : les plaintes qu’il faisait entendre sous le palmier du désert, accompagnent encore les funérailles des peuples chrétiens, et retentissent sur leurs tombeaux[1]. Le mélancolique Virgile se plaisait à rêver dans les environs de Naples, et le vers élégiaque ne fut jamais si attendrissant que lorsqu’il fut composé par Tibulle dans le climat voluptueux de l’Italie. Les arts ne vont point du Nord au Midi, mais du Midi au Nord. Les peuples septentrionaux n’ont fait qu’exagérer très souvent les défauts de la poésie orientale, qu’ils ont connue par l’établissement de la religion chrétienne. Les poëtes qui naquirent dans les pays où dominaient Luther et Calvin, durent, plus souvent que les poëtes catholiques, chercher des sujets dans les livres hébreux. L’autorité ecclésiastique ne les gênait point dans ce choix ; ils lisaient, ils expliquaient, ils employaient avec plus d’indépendance les annales et les croyances religieuses. La discipline de l’église romaine ne permit guère qu’aux orateurs sacrés l’emploi des richesses poétiques du christianisme ; mais elles appartinrent de droit à tous les poëtes de l’église nouvelle. Qu’on examine avec attention et sans préjugé Milton, Young, Klopstock, Shakspeare lui-même, on verra que ces auteurs sont plus ou moins empreints du caractère des poésies hébraïques. Un barde, ignoré onze cents ans dans les montagnes d’Écosse, n’a point formé les poëtes que

  1. Voltaire aimait beaucoup le poème de Job, et voulait l’imiter en vers dans sa vieillesse.