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ŒUVRES DE FONTANES.

Ovide, racontent souvent avec des circonstances très diverses, les généalogies et les aventures de leurs Dieux. La variété de leurs récits favorise singulièrement l’essor et l’indépendance de l’imagination. Ces Dieux qu’elle enfanta se prêtent à tous ses caprices. et se multiplient même quand il lui plait. Longtemps après Homère, Apulée raconte la fable de Psyché ; soudain Vénus à une rivale, et l’Olympe une déesse de plus. On sent que de telles licences sont interdites dans une religion où tout doit inspirer le respect et combattre les sens, où les faits et la doctrine sont immuables comme la vérité.

Mais, si la gravité du christianisme ne peut descendre jusqu’aux jeux de la mythologie, celle-ci, au contraire, prenant toutes les formes du génie poétique dont elle est la fille, peut imiter les effets majestueux du christianisme. Je suppose qu’on eût un poème épique de Platon, qui, comme on sait, voulut, dans sa jeunesse, être le rival d’Homère, et qui ne fut le premier des philosophes qu’après avoir essayé vainement d’être le premier des poëtes : croit-on qu’il n’eût pas su introduire dans les fictions mythologues quelques-unes de ces idées sublimes qui semblaient presque chrétiennes aux premiers pères de l’Église ? Et ce que Platon n’a pas fait, ne fut-il pas exécuté plus d’une fois par Fénelon ? L’Élysée, par exemple, tel qu’il est peint dans le Télémaque, n’appartient point au système du paganisme, mais à celui d’une religion qui n’admet qu’une joie sainte et des voluptés pures comme elle. M. de Châteaubriand